Reboot you [Grim]

REBOOT YOU Reboot you [Grim] 780741

Et si... Allic perdait la mémoire ?

featuring : Allic S. Beackerman, Griméus LaPluie

Les beaux jours revenaient à Modernis State. Les températures étaient encore un peu fraîches, du moins pour les Modernis, mais le soleil était présent de temps en temps, réchauffant doucement la ville. Allic était de sorti. Pas besoin de ses gardes du corps, aussi il les avait laissés à la maison. Tony n'insista pas quand il lui annonça où il se rendait. C'était à deux rues, ce n'était vraiment pas la peine de faire preuve de paranoïa.
Allic ne rencontra aucun obstacle majeur sur sa route, à part une troupe de petites filles en uniforme d'école privée, qui vendaient des billets de tombola. Allic acheta le lot avec sa carte de crédit, puisqu'elles disposaient d'une machine pour. Il s'arrêta devant la boutique, qui transpirait le luxe. Lorsqu'il poussa la porte, une délicate mélodie empli l'espace quelques secondes. L'homme sentit une atmosphère très subtilement parfumée, agréable, pas entêtante. Peut-être du jasmin avec de l'orange.
Un homme en livrée noire l'accueillit. Il était sec de physique et un sourire commercialement parfait étirait ses lèvres fines. Il ne semblait pas impressionné par l'arrivée de monsieur Beackerman, juste respectueux et lèche-cul. Parfait.

"Monsieur Beackerman. Nous vous attendions."

"Nous." Mais il était seul. Simple formule de politesse. Cet hybride avait fait ses classes à Gothik City et il importait beaucoup de pierreries de la vieille ville.

"Vous les avez reçues ?"

"Bien sûr, monsieur. Suivez-moi."

Allic le suivit donc, jusqu'au comptoir. L'homme sortit une petite clef d'argent de sa manche et ouvrit un tiroir ou un placard qui était caché au mafieux. Il exhiba un écrin de velours bleu nuit, dont il ouvrit le couvercle. A l'intérieur, enchâssées dans d'autre velours, deux alliances. En or, serties d'une unique pierre aux couleurs changeantes, dans les tons orangées. Parfois plus brun, parfois plus orange.

"Nacarat, tout droit extraite des mines de la Cyber Junkyard. Gravées à Gothik City. Examinées par mes propres soins ici même. Je certifies l'authenticité de l'or comme des joyaux. Il n'y a pas un défaut."

Allic sortit les anneaux l'un après l'autre et lu les inscriptions. "LOVE RAIN" Ca, c'était la sienne. "LOVE CHOCOLATE" Celle de Grim.

"C'est parfait."

Il paya et sortit avec les bijoux. Alors qu'il traversait la rue, il lui prit l'envie de les regarder encore. Il se souvint soudainement qu'il avait oublié son porte-feuille sur le comptoir de la bijouterie et fit demi-tour.
Un crissement de pneus. La peur soudaine en voyant un capot lui foncer dessus. La douleur. Le monde sans dessus dessous. Nouvelle douleur.
Les bagues avaient sauté en l'air. Roulé dans le caniveau. Disparues dans les égouts.

Allic se réveilla sur une civière, il reconnut l'intérieur d'une ambulance. Des voix témoignaient de la masse importante réunie sur le lieu de l'accident. Il avait atrocement mal à la tête et tenta de se relever. Mais on lui commanda de rester allongé. Il avait été renversé par une voiture.

"Téléphonez chez moi."

Il indiqua le nom de Tony dans son répertoire téléphonique et l'un des ambulanciers s'exécuta.

On voulu l'emmener à l'hôpital mais Allic exigea qu'un médecin vienne l'examiner chez lui. Il avait horreur des hôpitaux et ne voulait plus jamais y refoutre les pieds. La seule fois où il y avait été, c'était parce qu'il s'était cassé le poignet, à ses dix ans. Et il avait vraiment détesté. Heureusement, aucun de ses proches n'y avait jamais été. Et il n'avait plus jamais eu besoin de s'y rendre pour lui-même. En tout cas, il tempêta tant et si bien, malgré les paroles apaisantes et sages de Tony, qui semblait plutôt étonné de son comportement, qu'on accepta son exigence.
Quand il rentra dans le hall de sa maison, il se dirigea immédiatement vers la cuisine. Le médecin n'arriverait que dans une heure pour vérifier que tout allait pour le mieux dans sa tête, entourée d'un bandage. Il avait mal à la jambe, mais rien de grave. Et alors qu'il se préparait un cappuccino à la machine, quelque chose le frappa, sans savoir exactement quoi.

"Il y a quelque chose de changé dans cette cuisine..."

Allic, pour se rassurer, chercha ses flingues. Il ne trouva que Gomorrhe. Mais où était Sodome. Et puis, c'était quoi ce t-shirt ? C'était du AB, de ses tons habituels, mais il n'avait pas le souvenir de l'avoir acheté !
Il remonta dans sa chambre, avec un mauvais pressentiment, ignorant les vertiges légers. Tony le suivit, le soûlant de paroles. D'abord, il vit son reflet dans le miroir et cela le choqua. Il était certain d'avoir eu moins de rides au réveil ! Qu'est-ce que c'était que cette tête ?! Non, ce devait être le contre-coup de l'accident. Deuxième chose choquante :

"Tony ?!"

Il savait pertinemment que son ami était dans son dos.

"C'est quoi CA ?"

Il montra des vêtements qui n'étaient pas du tout de son style.

"Mais, c'est à Grim voyons."

Allic se retourna vivement, les sourcils froncés. Il eut un petit rire moqueur.

"Grim ? C'est qui ça, Grim ? Et c'est quoi ce nom ridicule ?"

Il vit une ombre de peur passer sur le visage de Tony. Quoi ? Il eut un doute et se précipita sur son armoire, qu'il ouvrit en grand. Idem avec la penderie. Non. Non. NOOOON ! QUELQU'UN EMPIETAIT SUR SON ESPACE VITAL PERSONNEL !

"TONY ?! QU'EST CE QUE CA VEUT DIRE ?!"

Il ne savait plus trop quoi privilégier entre la peur et la colère. En tout cas, plusieurs de ses hommes décidèrent pour lui. Ils se mirent à cinq pour l'attraper, l'empêcher de bouger et l'entrainer hors de la chambre. Là, Allic se mit en colère. Il protesta, exigea des explications.
Mais malgré sa résistance de dément, il se retrouvé ligoté à la chaise de torture de la cave. Il se dépêtra, faisant racler le meuble sur le sol, mais il savait bien que ça ne servirait à rien. Il ordonna qu'on le détache, mais apparemment les mafieux étaient tous de mèche avec Tony, qui leur expliquait quelque chose hors de portée de ses oreilles.

"TRAITRES !"

Ce mot aurait dû leur faire peur, car il les condamnait à une mort certaine. Mais aucune ne sembla terrorisé. Au contraire, ils lui jetèrent tous un regard peiné. Allic sentit un vent glacial traverser l'intérieur de son corps et il se figea. Merde, quelque chose de très grave se passait. Tony s'approcha, mais resta à une distance prudente.

"Ne t'en fais pas Allic. Mouloud est parti chercher Grim. Tu y verras bientôt plus clair, j'en suis sûr."

Le début de cette journée avait été parfait. Et encore c'était un euphémisme. Le blond s'était réveillé aux cotés de son amant, fiancé et amour qui le regardait tendrement. Ils l'avaient fait quelques minutes après puis avaient prit un bain ensemble. Grim avait ensuite laissé Allic faire la grasse matinée et était descendu dans la cuisine ou il avait retrouvé Yael, Julian et Ash. Le début de week-end rêvé en clair. Pour finir, il était allé à la pâtisserie qui ouvrait à onze heures le samedi. Tout s'était bien passé, aucun accroc, aucun problème dans le salon de thé, aucune réclamation des cuisiniers pendant le déjeuner, ce qui était un exploit en soi. Tout avait dérapé quand on lui avait annoncé qu'Allic s'était fait renversé. Son pire cauchemar. Allic ne pouvait pas mourir maintenant, alors qu'il était enceint de leur petite fille. Ils avaient choisi que ce serait une fille. Il ne pouvait pas le laisser avec l'héritière des Beackerman. Que deviendraient-ils? Il s'était fait conduire à l'hôpital mais était arrivé trop tard, Allic était déjà reparti. Tout allait donc bien. Grim avait du régler toutes les formalités puisque Tony avait dit que ce serait sa tâche. Au bout de trois bonnes heures et en étant passé par tous les services, il sortit enfin. Mouloud l'attendait dehors, trépignant.

-Tony a appelé, il faut vite y aller.
-Un problème?

Mouloud lui avait tout raconté durant la demi-heure qui les séparait de la maison. Allic avait surement eu un choc et s'était emballé. Le médecin avait dit qu'il pouvait perdre un peu la mémoire, pour une durée de temps limitée. Mais Grim ne pouvait pas y croire. Ils avaient passé plus de deux ans ensemble. Une fois arrivé, il descendit jusqu'à la salle de torture ou apparemment, ils avaient du le séquestrer. Personne ne lui avait tenu compagnie. Grim fit un signe à un mafieux qui lui rapporta une chaise. Ce jour là, il portait un grand sweat marron caramel à capuche bien trop grand pour lui, un pantalon moulant lacéré de couleur noir et de grosses chaussures noires. Il s'assit en face de son fiancé et remarqua les cordes. Avant même qu'il eut le temps de dire quelque chose, Tony lui dit qu'il avait fallu cinq hommes pour le maitriser. Lui d'habitude si calme. Se penchant en avant, Grim sourit tendrement à son fiancé.

-Mon cœur, que se passe-t-il? Il est arrivé quelque chose après l'accident?

Peut-être avait-il croisé Kalem, ce qui aurait pu le mettre sur les nerfs. Ou alors il avait appris une mauvaise nouvelle. A coté, Tony et Mouloud avaient prit place sur une des tables de la salle, poussant quelques instruments de torture. Il avait l'impression de faire passer un interrogatoire à son fiancé. Et il détestait ça.

[Désolée, j'ai pensé que ce serait rigolo de faire parler Mouloud en rose xD]

Le temps lui parut bien long. Allic finit par se calmer, assez rapidement. Il agissait certes avec exagération, trouant le crâne de quelqu'un sur un coup de tête, mais il était aussi capable de garder son sang froid, c'était plutôt connu. Affalé contre le dossier de sa chaise, les jambes bien écartées, Allic poussa quelques soupirs histoire de finir de se détendre. De temps en temps, il jetait un coup d'œil très significatif à l'un ou l'autre mafieux : "Traaaiiiitre !". Tony se faisait les ongles avec un lime. Pas le genre de lime en carton qu'on utilisait d'ordinaire en manucure. Allic le déplorait. Il aurait aimé lui faire sentir à lui aussi qu'il était très mal barré s'il ne le détachait pas dans les minutes qui suivaient.

Finalement, il y eut du mouvement. Ou plutôt, du bruit dans les escaliers, qui témoignait du mouvement. Allic porta son regard sur le mur quand il eut reconnu Mouloud et avant que celui-ci ne puisse poser ses yeux sur lui et constater que son boss lui manifestait un quelconque intérêt, ou de l'espoir. Non. C'était un dur. Mais il avait aussi remarqué que Mouloud était accompagné d'une autre personne, dont il n'avait aperçu que le pantalon, dans un triste état. Du coin de l'œil, il vit un petit blond fringué comme un sac faire un signe à l'un de SES hommes et cet homme lui obéit. Allic crut s'étouffer et dût s'y reprendre à deux fois pour retrouver sa respiration. Il se passait quoi, là ? Est-ce qu'il s'était évanoui plus de quelques minutes après cet accident ? On l'aurait remplacé ? Par... ça ?! Le "ça ?!" prit place juste en face de lui et lui jeta un regard... de merlan frit. Allic ne put empêcher une moue de dégoût imprégner son sourire tranquille.

... "Mon cœur." Allic jeta un rapide coup d'œil à droite et à gauche, mais il n'y avait pas de doute possible. Le blondinet s'adressait bien à lui, comme s'ils se connaissaient. Pire, comme s'ils se connaissaient intimement. Très très intimement. Comme s'ils étaient... un couple. Mais tout de même, si entre ce matin et maintenant il avait formé un couple avec un petit trop efféminé pour lui plaire, il l'aurait remarqué ! Non, ce mec n'était décidément pas son genre ! Oh, il avait un sweat couleur caramel. Mais c'était bien la seule chose qu'il aimait chez lui ! Il n'avait pas du tout la classe, on aurait dit un ado ! Ou... Ah, ça y était ! Ce mec lui faisait penser à certaines femmes enceintes, qui se négligeaient au niveau vestimentaire. Bon, okay, il était tout en bas de l'échelle des mal fringués, parce qu'il n'aurait aucune honte à se promener à côté de lui dans la rue. Mais tout de même. "Mon cœur..." On essayait de l'embrouiller peut-être ? Il y avait des trucs qui lui échappaient. Beaucoup de trucs peut-être, même. Et surtout une chose. Pourquoi, alors que ce mec faisait partie de ses "non baisable", avait-il une boule au ventre en croisant ses yeux vairons ?

Allic garda un visage fermé quelques secondes, puis...

"Je peux savoir ce que vous faites chez moi ?"

Il avait décidé de jouer la carte de l'honnêteté. Parce qu'il était urgent qu'il comprenne ce qu'il se passe.

Allic avait l'air dégouté. Le même air dégouté que quand il avait été séduit par Grim la première fois. C'était mauvais signe. Mais non, il ne pouvait pas avoir perdu la mémoire. Ça ne pouvait être la fin de tout. Pourtant il avait bien remarqué son air indigné quand Damian lui avait obéit. Merde alors, un simple choc avec le pare-choc d'une jeep avait pu effacer deux ans de vie commune? Grim fut soudainement prit de nausées matinales qui n'avaient de matinales que le nom étant donnée l'heure avancée de la journée. D'ailleurs, Grim se demanda qui était le débile qui avait inventé le nom de ces nausées puisque la gerbe dite matinale durait en réalité de minuit à minuit. Il lui arrivait même d'avoir envie de dégobiller en plein acte. Tony appelait ça "le mal de mer". Apparemment, le vampire faisait un début de grossesse difficile, il ne devait pas être trop secoué. Et il était de notoriété publique de son fiancé n'était pas toujours des plus délicats quand ils faisaient l'amour. Et puis, les nausées s'envolèrent. C'était du au choc. Allic avait vraiment perdu la mémoire…Grim soupira et lui jeta un regard désolé.

-Chez nous Allic. Je suis ton fiancé, c'est moi…Grim…

Il hésita à s'avancer puis se ravisa. Non il était trop tôt. Voilà que les nausées le reprenaient. Il fit signe à Tony de le suivre et monta en haut, là ou il vomit tout son saoul, Tony tenant ses cheveux couleur or avec un sourire moqueur. Après deux bains de bouche énergiques, il enleva son sweat trop chaud et opta pour une chemise rouge à fines rayures noires. Celle qu'Allic voulait tout le temps qu'il porte. Elle le moulait un peu trop mais c'était la seule chose qu'il pouvait porter. Chose heureuse, son ventre était encore plat. Il enfila aussi un jean noir à la place de son pantalon lacéré. D'une certaine façon, il voulait faciliter le retour à la mémoire d'Allic. Il redescendit, accompagné du meilleur ami de son fiancé et pénétra à nouveau dans la pièce. Damian et Mouloud le détachèrent à sa demande et le mafieux fut guidé dans sa cuisine où Grim lui prépara un cappuccino juste comme Allic les aimait. Corsé, un peu de mousse mais pas trop, un peu de cannelle et un filet de caramel sur la mousse, tout ça saupoudré d'un peu de chocolat en poudre. Ils n'étaient que trios dans cette pièce, Grim, Allic et Tony. Il fallait qu'Allic retrouve ses idées au plus vite.

-Allic, quel jour sommes nous?
-Est-ce que ton père et Eleira sont encore en vie?

Il fallait déjà savoir combien d'années il avait perdu dans le lot, après ils pourraient agir.

Loin de décourager l'autre, sa question ne fit qu'empirer les choses. Il osa même le corriger sur la formulation de sa phrase ! Allic fit une moue, eut un mouvement de recul, bien qu'il ne put aller bien loin.

"Mon fiancé ?" grogna-t-il sans hausser le ton mais en serrant les dents. "Ca me ferait mal."

Il était bien trop jeune pour se fiancé, bien trop peu amoureux de ce mec pas du tout dans ses goûts. Et il refusait de croire que ça puisse être vrai. Il se bornait à ne pas mettre en doute ses propres capacités, mettre en cause une faiblesse de sa part. Non, toute cette mascarade était forcément un coup monté contre lui.

Grim disparut, il n'avait pas l'air très bien. Allic s'en foutait, bien sûr. Qu'il crève, même ! Quelques minutes se déroulèrent ensuite dans le plus grand silence. Allic était déterminé à ne pas supplier et à garder un air tranquille, son petit sourire flottant sur ses lèvres. Le problème, c'est que le temps fut assez long pour l'avoir. Le doute. Saleté de doute. Et si... Si effectivement il avait une faiblesse ?
Des bruits de pas le sortirent du doute et il se secoua mentalement. Non. Pas de faiblesse. Une mascarade.
Grim reparut, dans de nouveaux apparats. Allic tâcha de calmer son cœur qui s'était mis à battre plus fort, immédiatement, comme si c'était une vieille habitude. Horreur ! Mais ce mec était boudiné dans sa chemise ! Pourquoi ça lui faisait un tel effet ?! Et il était moche ! Petit ! Efféminé ! BLOND !

Grim ordonna -ordonna ! non mais il rêvait là - à Mouloud et un autre de le détacher. Allic ne se débattit pas, ne chercha pas à s'enfuir. Parce qu'il avait le doute.
On le conduisit à la cuisine, où seuls restèrent ce blond boudiné dans sa chemise et Tony. Allic ne chercha à se rapprocher ni de l'un ni de l'autre. Tony était un traitre. Il tira la gueule en fusillant le comptoir du regard. Puis, il fusilla son cappuccino. Mais, il était tellement charmant ce cappuccino. Il avait l'air pile comme il l'aimait. Mais ce Grim ne l'aurait pas avec ce genre d'artifices, que non ! Il était certain qu'au goût...
Allic souleva un sourcil suspicieux, certain que le café ne serait pas à la hauteur de son aspect et souleva sa tasse. L'odeur était bonne. Le goût...

On l'interrompit dans sa dégustation test avec un bombardement intensif de deux questions. Il fronça presque imperceptiblement les sourcils. Traduction : "vous me dérangez". Le mafieux posa sa tasse sur le comptoir, sans lâcher l'anse. Et il leva la tête, ses yeux se portèrent sur la baie vitrée. Il faisait plutôt gris. Pourtant, ce matin, il faisait grand beau, non ?

Il choisit d'ignorer la question de monsieur Grim, qui n'avait aucune espèce de légitimité et qu'en plus il détestait. Tony... Pourquoi il lui demandait ça ? Il le prenait pour un demeuré ?

"Bien sûr que le vieux est mort ? T'es con ou quoi ? On l'a enterré vendredi. Et pour ta gouverne, je me souviens très bien d'Eleira. Et vivant ! Merci bien."

Il prit son café et le porta à ses lèvres. Ses yeux se fermèrent, il inspira l'odeur à plein nez. Putain. Il était EXACTEMENT comme il l'adorait. Allic reposa la tasse sur le comptoir et daigna lever ses yeux sévères sur ce Grim. Son cœur s'affola à nouveau, il prit une inspiration pour se calmer. Le cappuccino devait être un peu corsé.

"Vous êtes qui ?"

Oui. Qui ? Pour savoir faire un cappuccino aussi bon, aussi merveilleusement personnalisé et adapté à son palais exigeant ?

Allic l'ignora. Et pas qu'un peu. Il ne répondit même pas à sa question. Quel sombre petit enfoiré. Tony et lui partagèrent un regard à sa réponse. Il avait donc perdu deux bonnes années. Leur rencontre, la mort d'Eleira, l'arrivée des quatre gosses, les fiançailles, le mariage raté, la fausse couche, l'enlèvement, tout ça avait été oublié. Un soupir plus tard, il retira sa bague et la lui tendit.

-Je suis ton fiancé je t'ai dit. Regarde la gravure à l'intérieur.

Grim se dit que son mafieux voudrait des preuves, claires et signées de sa main et laissa à Tony le soin de lui dire que son "père" était mort. Il se tourna vers le placard de la cuisine et en tira la clef du bureau d'Allic ainsi que celle du sien, ancienne chambre d'Allic quand il était adolescent. Après avoir indiqué qu'il revenait, il monta et fouilla, récupérant plusieurs documents, tous signés de la main d'Allic. Quand il revint, les bras chargés, il constata que Tony avait la mine sombre. Allic avait du tout réfuter en bloc. Il posa ses affaires sur la table et commença à tout déballer, énumérant au fur et à mesure ce qu'il tendait à Allic.

-L'acte de décès d'Eleira, facture d'hôpital due à une balle prise à la cuisse, contrat d'adoption d'Ash, mon fils, notre fils, contrat de mariage, contrat d'implantation, papiers médicaux en tout genre, mon acte de décès, papiers d'enterrement, annulation de mon acte de décès, papiers médicaux encore, contrat de mariage deuxième édition et ton testament révisé. Ah et…

Il se leva sous le regard malicieux de Tony et partit fouiller dans le salon. Il revint avec deux gros livres marron caramel qu'il tendit à son fiancé.

-Ça ce sont nos albums photos.

Il sortit quelques photos du lot, désignant ici Ash, ici une photo prise avant leur mariage, ici encore Julian et Nioon, là Yael et il continua jusqu'à avoir résumé tout le monde.

-Tu es prêt à nous écouter maintenant ?

La réponse fut encore la même que précédemment. Son fiancé ! C'était qu'il ne lâchait pas le morceau ! Mais quand bien même c'était vrai, ça ne lui disait pas qui il était ce type ? Comment il savait... ? Ah... Si. Si, il était possible que son fiancé connaisse assez bien ses goûts en fait. Mais en supposant que ce qu'il racontait était vrai, alors ça faisait... Une bague lui arriva sous le nez, coupant court à ses suppositions silencieuses. Allic, soupçonneux et renfrogné, saisit le bijou du bout des doigts, comme s'il allait en sortir un gaz empoisonné. Comme le lui avait demandé Grim le fiancé, il inspecta l'intérieur. Sa vue n'avait pas baissée ? Non, ce devait être la fatigue. Et en effet, le blondinet n'avait pas menti. Mais ça, c'était facile à contrefaire. Il releva la tête, la bouche ouverte, pour lui balancer ce qu'il pensait à la figure, mais Grim avait disparu. Il se tourna sur son tabouret, pour voir son dos disparaitre dans la pièce adjacente. Il reposa la bague sur le comptoir et fit face à Tony, l'air clairement furieux.

"Bon alors maintenant tu vas m'expliquer ce que c'est que cette mascarade !"

Tony... garda son calme. Ce qui énerva encore plus Allic. Il le fixa, les sourcils froncés, l'air pincé, les poings serrés l'un sur le comptoir, l'autre sur sa cuisse.

"Ecoute boss, on dirait que tu as perdu deux ans de vie. En mémoire."

Allic avait envie de lui mettre un pain. Mais il se retint. Qu'est-ce qu'il allait inventer pour justifier cette trahison ?

"Au cours de ces deux ans, tu as fait la rencontre de Grim. Tu t'es fiancé avec. Et... Eleira... Est mort."

Il le regardait avec prudence désormais, et compassion. Mais même si le Parrain eut le cœur serré à cette annonce, il secoua la tête, sans changer l'expression de son visage.

"C'est impossible !" clama-t-il. "Deux ans et fiancé ? Avec lui en plus !"

Il pointa le doigt vers la porte.

"C'est complètement improbable ! Si j'avais du me fiancer avec quelqu'un, ça ne serait certainement pas au bout de deux ans ! En plus, je dois me marier avec une femme pour apporter une descendance Beackerman !"

Tony secoua la tête et tenta de le raisonner, de lui faire admettre la mort d'Eleira par dessus tout. Mais Allic le repoussait sans cesse, s'accrochant à cette idée : le mariage était impossible. Grim n'était pas son genre d'hommes. Et il était décidé à le lui dire, pour lui faire comprendre que son plan bidon ne fonctionnerait pas. Et surtout, il voulait lui faire du mal, il désirait qu'il souffre. Il haïssait cet homme qui se permettait d'empiéter sur sa vie comme s'il s'agissait d'un vulgaire script de cinéma.
D'ailleurs, Grim revint, avec une foule de documents qu'il lui étala sous le nez. Allic regarda à peine. C'était n'importe quoi ! De la science fiction, même dans leur monde. Qu'un homme puisse avoir un enfant ! C'était tout simplement aberrant ! Tout ce qu'il y gagnerait, ce serait la mort !

Le temps que Grim fasse intervenir les albums photos il avait repoussé tous les documents sur le sol dans un geste large du bras. Ce n'étaient que des faux et on avait habilement imité sa signature. Tony était accroupit sur le sol en train de rassembler la paperasse avec patience, alors que Grim lui montrait des tas de photographies, énonçant des noms. N'importe quoi ! Du délire total ! Jamais il ne se lierait d'amitié avec des adolescents de ce genre ! Celui là ressemblait trop à une fille et c'était censé être son fils adoptif ? Ridicule ! Et lui, on aurait dit un délinquant ! Et ce clown avec ses cheveux bleus ! Sans parler du petit roux, qui devait être un acteur de films pour ados pré-pubères.

"Vous écouter ? Je n'ai fait que ça !"

Son ton était vindicatif. Il se rapprocha de Grim, le fixant dans le blanc des yeux (parce que les couleurs étaient trop troublantes) et ses doigts se crispèrent sur le bord du comptoir. Son autre poing était serré sur son genou, prêt à frapper.

"Et franchement, tout ça ne m'a pas convaincu ! C'est si facile de faire des faux ! Si facile d'inventer des trucs complètement fous pour essayer de me déstabiliser ! Uniquement pour avoir mon fric ! Mais honnêtement... Jamais je ne pourrai me marier avec un type comme toi ! Tu es trop petit, trop efféminé, trop blond et moche ! Et tu m'as l'air bien con par dessus le marché ! Alors ? C'est pour le fric ? Oui, quoi d'autre ?"

Il sourit. Un sourire cruel. Et se recula, les bras croisés, dominant Grim et le toisant avec arrogance. Cette fois, c'était fini pour lui. Il était certain que ce gros menteur avait abattu toutes ses cartes. N'était pas né celui qui tromperait Allic Beackerman.

Parfois, malgré tous les efforts qu'on déploie, on ne peut rien à rien. On ne peut pas résoudre tel ou tel problèmes. Certaines choses sont inchangeables. Mais voilà, leur bonheur aussi aurait du l'être. Malgré tout ça, toutes les preuves, Allic n'était pas convaincu. Pour lui, leurs deux ans d'amour étaient factices. Et Grim se prit tout en pleine gueule. Il ne cilla pas de tout le monologue, même si il se faisait de travelo, de laid et de croqueuse de diamant. Tony regardait tout ça avec des yeux effarés. Quand tu ça fut fini, Allic arbora son sourire des grands jours. Celui qui signifiait qu'il avait terrassé son adversaire. Et effectivement, il avait terrassé Grim. Il l'avait ruiné, mis à terre et achevé. Grim semblait encore calme de l'extérieur mais à l'intérieur il n'était plus rien. Il ne valait guerre plus qu'un enfant en pleurs. Un enfant orphelin et pauvre. Le vampire détourna le regard alors qu'il sentait les larmes lui monter aux yeux. Mais non, il ne laisserait pas à son…il ne laisserait pas à Allic le plaisir de le voir fondre en larmes. Il ne put cependant s'empêcher de répondre à la question avec une voix cassée.

-Parce que je t'aime?

Il se détourna ensuite du mafieux et récupéra sa longue veste noire sur le porte-manteau. Tony hoqueta et adressa un regard sévère à son ami.

-Allic, tu-
-Laisse, je ferais mieux d'aller vivre quelques temps dans la maison familiale. Le temps qu'il se rappelle de "nous".

Le blond s'empara d'un magazine people où apparaissait un article relatant quelque chose sur le couple le plus prisé de Modernis.

-Je suppose que ça aussi c'est faux hm?

San attendre la réponse, le blond monta à l'étage pour récupérer des affaires. Liam l'avait bien prévenu que leur bonheur était trop parfait. Il fallait qu'il arrive quelque chose.

En bas, un album photo n'avait pas encore été ouvert. Il avait une couverture plus foncée, en cuir tanné. Dedans on pouvait trouver différentes photos imparfaites, prises sur le fait. Ju et Ash se bagarrant une part de tarte, Grim recouvert de farine qui embrassait Allic contre le meuble de la cuisine, Ash qui dansait une valse avec Allic et bien d'autres encore. Mais la plus importante se trouvait à la fin. L'échographie de leur bébé, faire quelques jours plus tôt. Au stylo bille, Allic avait noté "Arsenic or Alexiel, this is the question". Tout le monde avait décoré le bas de la page avec différents stylos. An Jyu avait tracé des petits cœurs roses, Ash avait ajouté quelques paroles de chansons, Ju avait écrit quelques lignes en Cyber, Yael avait fait des dessins. Même Caem avait mis la main à la pâte en écrivant quelques petites choses avec des trémolos. Plus important, au centre en bas, Ash et Allic avaient écrit en lettres capitales "WE ARE FAMILY". Mais ça aussi ça ne pouvait être que faux selon Allic.

Allic était tellement certain de sa victoire, fier comme un paon, qu'il tomba totalement des nues en entendant la réponse. En plus, la fin était teintée d'interrogation. Son sourire arrogant fondit aussitôt et il ne put retenir la surprise de teinter ses traits. Il se trouvait totalement pris au dépourvu, déconcerté. Et aussi, chose inédite : il se sentait super mal. Il aurait traité sa mère de pute que ça n'aurait pas été différent.
Allic baissa la tête et déglutit quand Grim fit taire Tony et se retira en annonçant qu'il retournait chez lui. Bien. Allic avait eu ce qu'il voulait. Alors pourquoi regretter ? Tony abattit son poing sur le comptoir, ce qui le fit sursauter légèrement. Allic leva les yeux vers lui, mais il n'arborait plus son air sévère. Plutôt inquiet même. Tony, lui, avait l'air calme. Il toisait son boss, mais pas assez puissamment pour qu'il puisse le lui reprocher.

"Alors, c'est vrai tout ça ?"

Tony hocha la tête et poussa vers lui un dernier album photo avant de sortir de la pièce sur un dernier conseil :

"Dépêche toi avant de faire une connerie."

Allic fronça les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il voulait dire. Il osa feuilleter l'album photo, bien rempli. Le mafieux s'attarda sur trois clichés. Le délinquant dans la piscine, lui au bord trempé, mais souriant quand même. Le blond et lui en train de se bécoter contre le frigo - mais qui avait pris cette photo ? Et tout à la fin, une échographie. Son cœur se gonfla d'amour pour ce petit être, Arsenic ou Alexiel. Non, c'était impossible que... Il fallait vraiment être déterminé, prêt à tout. Même s'il avait du mal à l'admettre, il sentait que tout ça, c'était vrai. Sinon, comment expliquer ses sentiments ?
Allic referma l'album et se leva. Quand il s'apprêta à monter l'escalier, il entendit quelqu'un le descendre. Grim, chargé lourdement. Allic se recula et l'attendit en bas, la tête basse. Quand l'autre passa près de lui, il tendit la main comme pour lui agripper le bras mais se ravisa, préférant opter pour un grattage de rampe d'escaliers. Mal à l'aise, les sourcils froncés, il semblait accuser le sol de tous les maux du monde.

"Reste, s'il te plait. Je veux bien essayer. Je sais pas si c'est vrai. Mais je dois savoir."

C'était difficile pour lui de se rabaisser à admettre qu'il avait tort. Mais en tout cas, il se sentait loin de pouvoir faire confiance à cet homme. Instinctivement, il voulait remettre sa vie entre ses petites mains. Mais sa raison était la plus forte.

coldrain ~ miss you

Grim avait prit le nécessaire et avait tout fourré dans deux gros sacs de sport appartenant à Allic. Grim ne faisait jamais de sport, si ce n'était un peu de course nocturne de temps en temps. Mais c'était plus pour se défouler que pour soigner son apparence, son corps étant déjà parfait. Dans les deux sacs, pèle-mêle étaient entassés des livres, des fringues, des bijoux, une brosse à cheveux, du matériel informatique, des bougies, quelques briquets, des clopes de différentes marques et bien d'autres choses qui n'avaient rien à faire là. Le blond croisa son ex-fiancé et le foudroya du regard alors qu'il le dépassait. Allic transmis ses foudres au sol. Quel con.

"Reste, s'il te plait. Je veux bien essayer. Je sais pas si c'est vrai. Mais je dois savoir."

Grim s'arrêta d'un coup et laissa tomber les deux sacs. Allic lui aurait dit qu'il pleuvait des poulpes qu'il n'aurait pas été plus abasourdi. Quelques minutes auparavant seulement, il le traitait de tous les noms et là, il voulait essayer? Grim tourna la tête vers la cuisine, un peu plus loin, et constata qu'un album photo était ouvert sur la table. Un sourire effleura ses lèvres. Bien sur. Son sourire léger s'effaça quand son visage refit face au mafieux. Il allait faire de sa vie un enfer, pour quinze minutes au moins. Ensuite il lui ferait l'amour, longuement. Avec de la chance, Allic se souviendrait vite. Il fut coupé dans ses réflexions par des bruits de talons, dehors sur le parvis pierreux. Qui? An Jyu ne se souciait guère du fiancé de son père, Hedwige ne mettait des chaussures de femmes que rarement et la tante Madge n'était pas en capacité de courir. Grim sourit à nouveau. Oui, elle bien sur. Il étouffa un rire alors qu'une grande femme qui faisait la moitié de son âge, aux longs cheveux ondulés et roux, se jetait dans les bras du Big Boss. Athanasie, bien sur.

"Allic! Oh, j'ai apprit pour l'accident. Tony l'a dit à Luchini qui l'a dit à Mario qui l'a dit à Nero qui l'a dit à Fabrizio mais Jean-Jean l'a entendu et me l'a rapporté! Mais peu importe! Comment vas-tu? Rien de cassé?"

La mère d'Allic était hyperactive depuis qu'elle était sortie du coma, deux mois plus tôt. Elle reporta son attention sur Grim et se jeta à son tour dans ses bras, le serrant contre elle, laissant ses vagues rousses voler dans les airs autour d'elle.

"Grim! Comment va Allic? Tu vas t'en occuper hm?
-Ne vous inquiétez pas Athanasie, j'ai la situation en main, ou presque."

La femme secoua la tête, sa frange gonflée balayant son front.

"Occupe toi de lui, je m'occupe des préparatifs de la cérémonie. Elle doit avoir lieu! Ce n'est pas un petit accident de voiture qui va mettre à terre un Beackerman!"

Grim avait exactement vingt-quatre jours pour qu'Allic se souvienne. S'il ne se souvenait pas passé ce delai, il ne le forcerait pas à se marier. Grim ne voulait pas que le brun se sente obligé à cause d'évènements passés. Et puis c'était un peu comme un challenge quelque part. Il devait séduire son homme à nouveau avant leur mariage. Il serait sur de l'entier consentement de l'humain, ainsi. Il pourrait songer à lui offrir l'Eternité si tout finissait bien.

Pas de réponse, mais le visage du blond n'était pas décourageant. Un bruit de talons les interpella alors tous les deux et leurs regards se portèrent sur l'entrée. Qui ? Il n'y avait aucune femme ici ! Et alors...

"Maman ?! Mais qu'est ce que tu fais là ?"

La question ne devait pas être digne d'intérêt, parce qu'Athanasie se contenta de le serrer dans ses bras en lui demandant des nouvelles de sa santé.

"Je vais bien maman, mais explique moi un peu..."

Après un baiser sur la joue, sa mère se jeta dans les bras de son supposé fiancé pour se mettre à parler de son propre fils à cet inconnu ! Allic en resta bouche bée. Mais... Il ne pouvait pas douter de sa propre mère. Elle ne semblait pas droguée, bizarre... Et oui c'était elle, aucun doute. En tout cas elle reparti bien vite, après avoir assuré qu'elle s'occupait de la cérémonie. Cérémonie... De mariage ?
Une fois qu'on n'entendit plus ses talons claquant sur les sols hors de prix, Allic se tourna vers Grim. Il était visiblement dérouté, mais refusait de considérer ce mec comme un soutien dans son désarroi. Enfin quoi ! Même s'il avait effectivement perdu la mémoire, même s'il devait se fiancer avec lui, dans l'état actuel des choses, il ne le connaissait pas du tout ! Et il ne l'attirait pas du tout non plus !
Allic détourna le regard, furieux, mais jeta un petit coup d'œil en coin au blondinet. Okay, peut être un peu. Il était pas si mal. S'il devait vraiment en faire quelque chose, il n'aurait pas trop de mal à se forcer. A la vérité, il avait envie de laisser tomber. Il avait la trouille de découvrir un lui même qu'il détesterait. Et puis... Il passait d'un état de célibataire libre comme l'air à celui de fiancé. Merde alors ! Il n'avait même pas choisi ce mec ! Comment pourrait il réellement vouloir faire sa vie avec lui ?! On l'avait obligé à beaucoup de choses dans la vie, mais jamais dans ses conquêtes.

Et puis, sa mère... Après la mort d'Alaric, Athanasie avait quitté la villa pour une petite maison dans un des quartiers résidentiels de riches de Modernis, presqu'à l'autre bout de la ville. La dernière fois qu'il l'avait vue, Allic avait craint qu'elle ne se suicide. Mais apparemment, elle allait beaucoup mieux.

Allic regrettait un peu, mais il avait promis d'essayer, non ?

"Alors ? Qu'est ce qu'il faut faire en premier ? Qu'est ce que je dois savoir ?"

Il regardait Grim, mais son visage était neutre. Il s'efforçait de ne montrer aucun sentiment, il était juste poli.

Grim prît doucement la main de son fiancé. Il ne voulait pas le brusquer. Surtout pas. Il lui accorda un regard tendre avant de détourner les yeux. Lui expliquant qu'il valait mieux faire un tour du propriétaire avant de commencer, il serra un peu plus sa main. A commencer par la cave. Elle avait bien changé. Tout au fond se trouvait une batterie bien entretenu, devant, deux pieds à guitare étaient posés. Un bureau, non loin, était recouvert de papiers, de la partition aux paroles griffonnées.

"C'est le studio d'enregistrement d'Ash et de son groupe. Ils répètent ici fréquemment, heureusement que c'est insonorisé."

Il le conduisit ensuite à la salle de torture, un peu plus loin. Là, rien n'avait bien changé, si ce n'était quelques taches en plus. Il frémit en repensant à leur dernière séance SM ici. Peut-être qu'Allic aurait un flashback en voyant le mur crépi contre lequel il l'avait prit. Ensuite, direction la cuisine, le bureau du rez-de chaussée et toutes les autres pièces qui devaient être vues. Ils finirent par la chambre conjugale. Redécouvrant les pièces, il avait eu quelques frissons. Ils l'avaient fait dans chaque pièce de cette villa. Oui, chaque pièce. Même la chambre de Yael. Une fois qu'Allic eut constaté "les dégâts" il lui prit à nouveau la main et l'emmena dan s la dernière pièce. La plus importante. Une chambre tout en noir et blancs, exceptées les taches de couleur dans les tons orangés et marrons.

"C'est la chambre du bébé. C'est Ash qui l'a décoré…"

Il tourna la tête vers Allic et lâcha sa main. Se reconcentrant sur la chambre, il s'avança vers le berceau noir en bois vernis et prit la petite laine blanche qui y avait été mise. En prévision. Sans tourner la tête vers le mafieux, il reprit.

"Je ne te forcerais pas. Si tu décides de ne pas te marier, on annulera. Pour le bébé… je prendrais sur moi. Je veux juste que tu saches que je t'aime à en mourir. Depuis l'instant où j'ai emménagé ici, j'ai su que ce serait avec toi que je fonderais une vraie famille. Et je ne veux pas te forcer la main en te faisant signer un stupide bout de papier. Je ne veux pas me réveiller dans ton lit dans vingt ans et me demander quelle choix tu aurais fait. Et puis il y a autre chose que tu dois savoir."

Il se retourna, plantant son regard dans celui d'Allic, sans lâcher le tissu.

"Je suis un vampire. Je suis un vampire de cinquante trois ans et… il y a un an et demi, tu as fait un caprice pour que je me nourrisse uniquement sur toi. Tu es devenu mon calice."

Une raison de plus pour qu'il le laisse tomber. Presque rien n'était en sa faveur? Un vrai challenge digne de lui. Il y arriverait. Il s'était juré d'atteindre le bonheur, peu importe ce qui arriverait.

Première étape de l'opération : la visite. C'était bien joli mais c'était sa maison, alors il connaissait déjà. En plus, ils commencèrent par la cave, l'endroit qu'il connaissait le plus. Sauf que... Il y avait eu quelques changements. Dans ses souvenirs, il n'y avait pas du tout du matériel de musique dans cette pièce ! Lui il aimait l'opéra, l'OPERA ! Même si cette pièce était soit disant insonorisée, il devait souffrir ! Ou alors... Oh non ! Peut être que maintenant, il aimait le rock ! Tout ça ne lui plaisait pas du tout, mais alors pas du tout !

La suite de la visite fut jalonnée de surprises du même genre. Certaines l'étonnèrent, d'autres lui déplaisèrent, mais aucune ne lui apporta satisfaction quant à sa nouvelle vie. Jusqu'à une certaine pièce.
Il tenait la main de Grim, contact qu'il avait accepté sans broncher. La main de l'homme lui semblait froide, mais sa peau dégageait une telle chaleur que ça lui faisait cette impression avec beaucoup de personnes. Ou alors, Grim souffrait peut être juste d'une mauvaise circulation. Une fois dans la chambre, qui était clairement celle du bébé, Allic agrandit les yeux. C'était beau. Ca lui donnait presqu'envie de l'avoir, ce mioche. Apparemment, c'était ce Ash qui avait décoré. Le même qui avait un groupe. Il avait sans doute fait carrière dans la décoration, parce qu'Allic se connaissait trop bien sur ce point. Jamais il n'accepterait le travail d'un amateur. Et ce qu'il avait devant les yeux était clairement le fruit d'une passion de la décoration, un professionnel aguerri, qui avait un goût incroyable.
Son fiancé lâcha sa main et Allic en fut heureux, car il en profita pour arpenter la pièce comme il le désirait. Ce choix des couleurs lui plaisait énormément et l'agencement des meubles n'aurait pu être meilleur. Il se tourna vers Grim, assis sur un bureau, un morceau de laine entre les mains. Le mafieux s'approcha, mais s'arrêta à mi chemin, perdant quelque peu de son air émerveillé. Il avait eu une pulsion : le prendre dans ses bras et l'embrasser avec tendresse, comme s'il était déjà son mari. Ca allait pas bien dans sa tête ! Il avait du prendre un sale coup, vraiment. Heureusement, le blond ne le regardait pas.

"C'est très... beau. J'aime bien les touches marron."

Ces mots n'exprimaient pas toute l'ampleur de la vérité, mais il n'eut pas le temps de rectifier le tir. Grim lui balança tout un truc sur ses obligations. Allic secoua la tête, les doigts accrochés à ses poches de pantalon.

"Hum... Je ne me sens pas prêt à quoique ce soit actuellement, c'est vrai. Mais on verra. Il est trop tôt pour penser à ça. Pour que JE pense à ça."

Il pinça les lèvres, les mordillant. Grim l'aimait à en mourir. C'était beau. Mais effrayant. Mais pas autant que ce qu'il lui annonça, son regard froid planté dans le sien. Allic resta figé, une cascade glace pillée venait de descendre son toboggan digestif. Et s'était rétamée dans son estomac. Vampire ? Ca, c'était une nouvelle. Il perdit son sourire pour un masque de cire. Son regard était vide. Il ne savait vraiment pas quels sentiments cette nouvelle lui inspirait. Il n'y avait pas de peur, pas de dégoût. C'était juste... Quelque chose. Ou alors c'était cette histoire de calice qui lui en avait foutu un coup. Bordel de merde, si tout ça était vrai, comment avait il pu se donner corps et âme à un mec ? En deux ans à peine ! Ce n'était pas du tout son style ! Son cerveau malmené se contenta donc de s'accrocher à un détail trivial et bien plus agréable. Il retrouva son sourire, même si celui ci était un peu crispé, et balança avec une jovialité maladroite :

"Oh mais ça veut dire que je me suis enfin fait un vampire ! C'est super !"

Il marqua une petite pause. Non, pas possible... En même temps, d'après ce qu'il avait constaté sur le nouveau lui, ça ne l'étonnerait même pas. Et puis, s'il était enceint, ce n'était sûrement pas par la méthode naturelle. Balayant l'air de ses doigts tendus vers le... vampire, il demanda une petite précision.

"Dis, on est un de ces couples qui attendent le mariage pour consommer ou j'ai de vraies raisons de me réjouir ? Arrête moi tout de suite si je m'extasie pour rien."

Le mafieux perdit son sourire rapidement. Il tenta de camoufler sa gêne et sa surprise derrière une phrase d'une stupidité affligeante mais qui faisait bien "Allic d'avant". Grim eut un sourire espiègle à la deuxième réaction de son fiancé. Il s'approcha lentement, d'une démarche presque féline, hypnotisante, son regard toujours plongé dans les yeux marron de son futur-mari. Vite, Allic se retrouva acculé contre le mur, Grim contre lui. Il lâcha son regard et l'embrassa dans le cou, remontant jusqu'à son oreille gauche. Sa langue vint titiller le lobe de son oreille alors qu'il lui susurrait sa réponse.

"Trois fois par jour en moyenne, ça peut aller jusqu'à cinq le week-end."

Malgré son envie immédiate de le sauter pour lui montrer, il s'écarta lentement, lui jetant un regard brulant. La parade de séduction avait commencé.

"Tu m'excuse, j'ai un dîner à faire."

Après un sourire franc, il descendit à la cuisine où Ash et Julian parlaient mécanique avec Tony. Saluant son fils et son gendre, il se mit immédiatement aux fourneaux et les vira dans le salon. Mettant un CD de concerto pour cordes dans la vieille chaine hi-fi de la cuisine, il attrapa son bouquin de recette. Pour une fois, il avait besoin de cuisiner seul. La musique assourdissante résonnant dans la pièce carrelée, il s'attela à son poulet au porto rouge, poivrons et tomates. Il entendait du bruit dans le salon mais ne faisait pas vraiment attention. Enfin, il sortit de la cuisine, tablier taché, toque de travers pour annoncer que le repas était presque prêt, demandant aux adolescents de mettre la table. Retirant son tablier et sa toque, il s'assit dans un des fauteuils du salon, en face d'Allic. Il était prêt à parier qu'Ash lui avait sauté dessus une fois passé la porte. Depuis sa "mort", l'adolescent et le mafieux s'étaient énormément rapproché. Et Ash était revenu vivre à la maison. Julian ne vivait pas officiellement à la villa mais il y passait le plus clair de son temps, squattant autant que Caem et An Jyu. Yael était toujours là mais il s'effaçait tellement qu'on ne le remarquait que rarement. Et Nioon…Histoire compliquée. Quoiqu'il en soit, Allic avait eu avec Athanasie la preuve de la véracité de ses propos, il restait le plus dur à faire: le convaincre de ne pas le quitter.

Grim ne répondit d'abord rien, et puis il s'approcha. Son attitude était clairement celle d'un prédateur. Allic aussi en était un normalement, mais il savait que Grim était un vampire. Il se savait fiancé à lui. Père. En d'autres termes, il était dans une position nettement inférieure. Alors, il se sentit en danger. Mais attention, le même danger que quand il se rendait à une fusillade. Un danger qui l'excitait. Son cœur se mit à battre un peu plus vite alors qu'il reculait, jusqu'à ce que son dos heurte le mur. Là, il entrouvrit les lèvres, comme s'il se retenait de pousser un cri. Et le vampire vint à lui. Il le sentait dans son cou, son oreille. Allic ferma les yeux, les mains plaquées sur le mur derrière lui, ses doigts crispés. Il tremblait. Cinq fois les week end ? Il bandait. Et la présence oppressante disparut, pour aller préparer le dîner. Allic ne rouvrit les yeux que quand Grim eut disparut de la chambre. Là, il réussit à se détendre un peu et se décolla de la tapisserie. Bon sang... Un vampire. Il n'y avait qu'un vampire pour produire un tel effet. Peur et excitation mêlées. Déjà que le danger l'excitait... Mais là... Il avait tout de même eu une réaction étrange. Il n'aurait pas dû bander de cette manière.

Calmé, Allic descendit au rez de chaussée. Il avait été le plus discret possible, fouillant chaque recoin pour éviter de tomber nez à nez avec Grim de manière opportune. Dans sa tête, une image défilait en boucle. A leur prochaine entrevue, le vampire le mordrait. Et le tuerait. Et lui, il mourrait avec une troisième jambe bien raide. Allic ne savait pas s'il devait fuir ou rester, trop heureux de cette fin. C'était un comble, il ne se sentait même plus chez lui !
La descente jusqu'au salon se déroula sans encombre. Mais il avait à peine posé le pied dans la pièce qu'une armada adolescente jaillit et lui sauta dessus. En particulier un des membres de cette armada, qui se mit à l'appeler "Papa" et à lui dire des trucs sans queue ni tête, en le serrant dans ses bras d'une manière qu'il aurait jugée un poil trop affectueuse pour une relation filiale.
L'armada disparut pour une raison qui lui resta inconnue mais laissa la place à Grim. Allic se sentit blêmir et s'affala dans un fauteuil, alors que le vampire prenait place en face de lui. Le mafieux posa son coude sur l'accoudoir (c'est fait pour) et massa son front, masquant son visage à demi avec sa paume. Merde, il avait la trouille. La trouille de quoi ? Il ne savait pas trop. En fait, il étai surtout dégoûté d'être aussi paumé dans sa propre maison. Lui qui venait enfin d'acquérir la fortune et l'indépendance ! Qui était le maître ! Le voilà contraint à accepter de nouvelles foutues obligations ! Quand donc aurait il le choix ? Un choix réel.

Il souleva la tête, observant Grim comme si celui ci ne pouvait pas le remarquer. Il avait l'air fin avec toutes ces tâches. Alors pourquoi est ce qu'encore une fois son cœur s'emballait ? Et puis, dès qu'il avait posé les yeux sur le vampire ainsi accoutré, toute crainte s'était envolée. Il était comme rassuré. C'était vraiment trop bizarre. Plus de maison. Plus de repère. Et il ne se comprenait même plus lui même.

"Y'a quoi à becqueter ?"

Sa voix se voulait brusque. Mais elle était faiblarde. Presque blanche.

Le silence retomba après la question du parrain. Que devait-il dire? Que devait-il répondre? Grim jouait un jeu dangereux et chaque mot pouvait le faire tomber aux oubliettes. Son histoire d'amour avec Allic était en jeu mais aussi le confort personnel d'Ash et la relation filiale entre le mafieux et le jeune LaPluie. Et puis le blond portait l'héritier légitime de la famille Beackerman. Que deviendrait ce bébé si Allic le jetait? Le cuisinier se leva et s'approcha de son mari, posant ses mains des deux cotés de sa tête, rapprochant son visage du sien. Ses lèvres effleurèrent celles du brun et une de ses canines pointues vint entailler sa lèvre pâle. Un peu de sang s'échappa de la plaie, colorant la bouche tentatrice mais Grim l'essuya très vite d'un coup de langue habile. Il se releva souplement et jeta un coup d'œil à la table de la salle à manger où Julian, Yael et Ash étaient attablés. Non. Reportant son regard sur son fiancé, il s'humecta les lèvres et désigna d'un coup de tête l'escalier.

"Monte dans la chambre, Jean-Jean t'apportera un plateau."

Sans faire attention à son mafieux, il retourna dans la cuisine. Il prépara lui-même le plateau avec amour, le laissa à Jean-Jean le Fidèle et partit nourrir le troupeau. Une fois le repas fini, la vaisselle faite et le ménage de la cuisine exécuté proprement, Grim monta se mettre au lit. Il dépassa les trois gardes habituels de la porte de sa chambre, Adalberto, Pierluigi et Jacopo et ferma les grandes portes de bois restées jusqu'ici ouvertes. Tony avait quitté récemment la pièce, Grim sentait encore sa lourde odeur dans la pièce. Non pas déplaisante, au contraire, mais très odorante. Le plateau était posé sur la commode. Grim se dirigea en silence vers la salle de bain et se dévêtit pour enfiler son déshabillé marron en toile transparente. Il commençait à faire très chaud à Modernis, surtout pour un vampire. De retour dans la pièce, il se glissa dans les draps en coton et sourit Allic, détachant son chignon de vaisselle-ménage.

"C'était bon au fait?"

~ Le meilleur moyen d'atteindre le cœur d'un homme est de passer par son estomac. ~

12012 ♫ ONCE AGAIN

Etait-ce si compliqué comme question, "qu'est-ce qu'on bouffe" ? Allic tordait des lèvres, qu'il avait pincées, et son regard reflétait clairement sa méfiance. Cette dernière s'était amplifiée avec son nouvel attrait sexuel pour Grim. Tout ça, c'était louche. Il ne pouvait pas se fier à ses hormones pour ce genre de jugement.
Le vampire - oui, il avait bien intégré la notion de vampire - se pencha vers lui et Allic recula dans le fond de son fauteuil. Il se fichait de le blesser par cette attitude. Il ne voulait surtout pas exposer trop son cou. Il était désarmé - imbécile qu'il était. Mais l'arrière de son crâne n'atteignit jamais le renfoncement du dossier prévu à cet effet, car Grim tenait son visage entre ses mains. Allic n'avait même pas envie de protester et de fuir, même si son cœur cognait sourdement dans sa poitrine. C'était très dangereux. Et là, une petite douleur à la lèvre. Allic s'y passa la langue par réflexe, y rencontra une autre, ainsi que le goût du sang. Il leva des yeux interrogateurs vers ceux de Grim. Le vampire se releva la seconde d'après, il ne lui accordait plus son attention. Mais le temps qu'Allic jette un coup d’œil en direction de la salle à manger, Grim lui commandait de retourner dans sa chambre. Et il partit. Allic posa ses avant-bras sur les accoudoirs pour se propulser hors du fauteuil, mais se figea avant l'action musculaire. Les sourcils froncés, il fouilla le tapis des yeux en se demandant pourquoi il lui obéirait. Et là, son estomac gargouilla.

Allic accueillit le plateau porté par Jean-Jean avec un certain empressement. Il le posa sur le bureau qui lui servait de foutoir (même si c'était un foutoir rangé) et dévora le poulet au porto. Quand il eut terminé, il s'essuya la bouche et vérifia dans la salle de bain qu'il était présentable. Il décida qu'une haleine de vin lui allait bien et alla déposer le plateau sur la commode pour nettoyer les miettes de pain qui avaient sauté sur le bureau et qu'il déposa sur le rebord de la fenêtre. Jean-Jean était parti depuis un bout de temps. Allic ne s'était pas sitôt fait cette réflexion que la porte s'ouvrit. Son cœur fit un bond et il se tourna vers l'entrée de la chambre, l'air inquiet. Mais ce n'était pas le sujet de son appréhension.

"Tony..." soupira-t-il de soulagement avant de se souvenir que Tony n'était peut-être pas à considérer comme son ami.

Allic leva un sourcil suspicieux à l'encontre de son presque-frère et attendit que celui-ci prenne la parole. Il avait une figure neutre, rien d'extraordinaire. Cependant, il ne lui dit rien avant de lui avoir fourré Gomorrhe dans les mains. Allic regarda son arme, sans comprendre.

"Si tu crois toujours qu'on te ment, fais ce que tu as à faire. Tu es assez intelligent pour savoir. Et tu as beaucoup plus de flair que ton père. J'ai confiance en toi."

Là-dessus, Tony lui donna une tape fraternelle sur l'épaule et tourna les talons. Allic vérifia que son flingue était chargé. Satisfait, il rejoignit la fenêtre, devant laquelle il se planta, les bras croisés. Gomorrhe ne pouvait être vu de la porte. Comment devait-il prendre ce "don" ? Une preuve de confiance ? Ou une tentative pour l'amadouer ? Lorsque la poignée s'abaissa à nouveau, Allic n'avait toujours pas pris sa décision. L'homme se tourna à demi, découvrant bien cette fois Grim. Il lui sourit aimablement, se tordant presque le cou pour le regarder sans avoir à lui dévoiler ce qu'il tenait dans sa main droite. Le vampire disparut sans rien dire dans la salle de bain. Ca contraria Allic, qui avait vraiment le sentiment qu'on bafouait son chez lui et qu'on violait son intimité.

Quand Grim refit son apparition, Allic était encore devant la fenêtre, dans la même position. Il entendit des bruits de tissus, le vampire se glissait dans SES draps (de satin). Allic fronça les sourcils. Bon, c'était un vampire, non ?

"Oui, oui. Excellent. Tu cuisines bien."

C'était vrai. Mais il n'avait pas changé d'avis. Allic fit volte face, tendit son bras, et tira en visant le ventre de Grim. Il venait de trouer ses draps. Peu importait. Plus ennuyeux : il avait le sentiment très fort d'avoir fait quelque chose d'affreux.

Il s'apprêtait à dormir. Il avait hésité quelques minutes mais il avait sa place dans ce lit, et s'il voulait séduire Allic il ne devait pas y aller avec le dos de la cuiller. Et trancher dans le lard. Même si Allic n'avait pas franchement beaucoup de lard. Il y aurait à peine eu de quoi faire quelques omelettes au lard et aux épices. Quoiqu'il en soit, Grim alluma sa lampe de chevet et ouvrit son roman du soir. Le quotidien n'allait pas changer pour si peu. Allic et Grim avaient survécu à pire. Bien pire. Comme la tante Madge par exemple. Il reprit donc sa lecture au chapitre cinq, où le héros allait découvrir que son père l'avait trahi. D'abord, il ne ressentit qu'une douleur sourde. Le sang avait taché les pages de son livre. Vite, il se rendit compte qu'on lui avait tiré dessus. Il avait déjà ressentit ça plusieurs fois. Le ventre. On avait visé le ventre. Relevant la tête vers Allic, il lui lança un regard blessé. Il tenait Gomorrhe. 'Pourquoi?' Il eut la présence d'esprit d'appeler Tony qui le fit transporter à l'hôpital. Il se réveilla quelques heures plus tard. On fit appeler le médecin qui lui expliqua la situation. Blessure par balle, fatale.

"Votre enfant n'a pas survécu."

Désespoir. Rage. 'Pourquoi?'

"Ce n'est pas tout. La balle a fait de tels ravages que plus jamais vous ne pourrez porter un enfant. Je suis désolé."

Grim resta digne. Il attendit que le médecin soit parti pour exploser en pleurs. Mortifié. Non, mort. Allic avait tué leur enfant. Il ne lui restait plus rien. Pas même Allic. Par erreur, il avait débranché un tube. La douleur le fit tomber dans l'inconscience.

Voilà deux semaines qu'il avait tout perdu. Il s'était fait transporter chez lui, à la maison LaPluie. Ash restait avec lui autant qu'il pouvait, Liam tentait d'apaiser son chagrin mais sa satisfaction était trop évidente. Grim devait tirer tout ça au clair. Il attendit que Liam s'assoupisse et que son fils soit au lycée pour s'enfuir discrètement. Il était rétabli physiquement. Il put donc faire le trajet qui le séparait de la villa en courant sur les toits. Une fois arrivé, il entra dignement dans la grande bâtisse sans qu'aucun mafieux ne l'arrête. Il était toujours le fiancé du patron après tout. Une fois dans le bureau, face à Allic, il ordonna à l'un des hommes de sa garde personnelle de verrouiller la porte de façon irrémédiable. Aussitôt, il sortit Sodome, qu'il avait gardé avec lui, de son holster pour tirer sur la cuisse gauche d'Allic. Comme deux ans auparavant. La balle traversa le bois pour se ficher dans la chaire. Aussitôt, le blond pointa son arme sur le crane de son bien-aimé.

"Tu as tué notre enfant. Tu as abattu de sang-froid celui qui devait être ton héritier. De mon avis tu mérites la mort. Donne-moi une raison de ne pas t'abattre Allic."

Grim ne pourrait jamais tuer Allic, c'était du bluff. Mais du bluff très convaincant. Grim espérait une explication. Et si Allic lui disait que c'était pour une raison simple, qu'il ne l'aimait pas, il n'aurait qu'à se supprimer. Si Allic ne voulait pas de lui, il n'avait plus rien à faire sur cette Terre.

D'espairsRay ♫ screen

Il avait tiré. Il avait tiré sur un vampire. Ce n'était pas fatal. Il allait s'en remettre. Il lui signifiait juste... Juste... Il ne savait plus trop pourquoi il avait fait ça, parce que tous les sentiments qui l'avaient conduit à ce geste venaient d'être remplacé par un autre, beaucoup plus fort et envahissant. Il avait la gorge nouée, un nœud dans l'estomac. Une appréhension sans précédent. Il avait mal en lui. Et se haïssait, comme s'il haïssait quelqu'un d'autre qui venait de lui causer un grand tort. Non, pire. Qui venait de foutre sa vie en l'air. Et il détestait voir ce sang.
Allic était hypnotisé par ce sang, le bras tendu, le canon de Gomorrhe fumant, jusqu'à ce qu'il se fasse violemment bousculer par Tony et reprenne ses esprits. Il cligna plusieurs fois des yeux et observa la scène qui se déroula ensuite, comme si le temps était accéléré. "Attendez !" avait-il envie de crier, parce qu'il ne comprenait rien à ce qui se passait. Et il finit par se retrouver seul dans la chambre.

Allic décida de descendre au garage. Il prit une voiture qu'il ne connaissait pas, une décapotable noire. Il dénicha les clefs correspondantes sur le panneau en liège (lui au moins était toujours là) et sauta sur le siège conducteur. Il était fébrile, mai réussi à démarrer. Très vite, il repéra la voiture de Tony et les suivit.

A l'hôpital, il suivit tout de loin. Les mafieux étaient en effervescence. Pouvait-on réellement jouer une telle émotion ? Allic déglutit avec difficulté quand Tony le repéra. Il avait l'air de lui en vouloir, beaucoup.

"Alors tu l'as fait. Tu ne pouvais pas être pire. Putain, tu me déçois Allic."
"Va te faire foutre, Tony," ragea Allic.

Son meilleur ami s'en alla en pestant, comme s'il l'abandonnait. Allic avait été sur la défensive, alors qu'il aurait dû se jeter à genoux et implorer le pardon. L'homme baissa les yeux sur ses mains, qui tenaient toujours Gomorrhe. Cela aurait été du sang plutôt que de la poudre, sur ses doigts, ça n'aurait pas eu un effet différent. Il s'en voulait atrocement. Allic releva la tête et vit la porte de la chambre de Grim s'ouvrir. Il traversa le petit groupe de mafieux, qui lui jetèrent tous un regard noir qu'il feint d'ignorer, et aborda le médecin.

"Comment va-t-il ?"
"Malheureusement, le bébé est perdu. Et ce qui a été fait à Cyber ne pourra être refait. Monsieur LaPluie ne portera plus jamais d'enfant."

Et il s'en alla. Allic déglutit encore, faillit s'étouffer avec sa propre salive tellement sa gorge était sèche. Putain... Alors c'était ça. Une envie incompréhensible le poussa à entrouvrir la porte de la chambre et son cœur s'emporta en entendant ce qui s'y passait. Mais cela le convainquit aussi de ne pas entrer. Il referma le battant et s'appuya contre le mur, le regard vide. Il avait envie d'y aller, de partager sa douleur. Mais il ne le pouvait pas. Il était le coupable. Pourtant, quand il imaginait Grim en larmes là-dedans, il ne pouvait s'empêcher de voir une autre personne pleurer avec le vampire, le tenant dans ses bras. Lui.

Pendant les jours qui suivirent, Allic dévasta son bureau. Il était en colère et le fait qu'il n'arrive même pas à comprendre les fondements de cette rage l'amplifiaient. Le fauteuil était même passé par la fenêtre, avait atterri dans un plant quelconque de fleurs quelconques et s'était brisé. Il s'était effondré au milieu des éclats de verre, indifférent aux coupures de ses mains. Il avait pleuré. Beaucoup. Tony était venu le consoler, ou au moins partager sa douleur. Il avait compris qu'il regrettait. Amèrement.

Un jour, Allic était encore une fois enfermé dans son bureau, tout frais lavé, lorsque Grim débarqua. L'homme leva les yeux de son journal et les posa sur le vampire, ne laissant pas ses émotions transparaitre. Il ne réagit même pas en voyant son propre flingue entre les doigts de Grim, qui tira. Allic se reçut la balle dans la cuisse et hurla, avant de serrer fortement sa jambe. Il ne pensait pas à stopper l'hémorragie par la pression, c'était juste un réflexe idiot destiné à stopper la douleur. Ca ne marchait pas. Il se figea en sentant le canon contre son crâne.

"Une raison ? J'en ai une. Que ce soit une mascarade, un beau tissu de mensonges destiné à me tromper. Et si... Si tout ça est bien vrai, alors... Tue-moi."

C'était ce qu'il méritait, comme Grim venait de le dire. Et c'était au vampire de le faire, de ses mains propres. Sinon, Allic se serait déjà supprimé. Il voulait tuer quelqu'un, c'était un sentiment étrange, comme s'il y avait une autre personne en lui. Une personne qui savait exactement pourquoi ce geste avait été si affreux. Quelqu'un qui ne désirait qu'une chose. Plomber le corps du meurtrier. En l’occurrence, lui-même. Tout cela finissait par devenir glauque.
Maintenant, Grim allait lui faire sauter le caisson. Allic était tendu au maximum, les yeux fermés. On y était. Sa mort. Il imaginait déjà la balle traverser son crâne et lui exploser le cerveau. De toute façon, si le vampire n'appuyait pas rapidement sur la détente, il allait se vider de son sang par la cuisse.
Sa dernière pensée. Quelle serait sa dernière pensée ? Il devait se dépêcher de se décider.

Il le suppliait presque de l'achever. La souffrance était lisible dans ses yeux. Il regrettait, amèrement. Grim ferma les yeux et tenta d'évaluer son courage. Même si Allic était le pire des enfoirés en ce moment dans l'esprit de Grim, il ne pouvait s'empêcher de l'aimer passionnément. Il ne pouvait oublier ces deux années avec lui, tous ces moments partagés. Pouvait-il supporter d'abattre froidement son fiancé alors qu'il avait déjà perdu son enfant? Après deux secondes d'hésitation, il prit sa décision. Oui, il pouvait le faire. Allic avait mit en danger la sécurité de la famille en tuant son héritier. Il avait fait exprès. Il avait tout fait exprès. Il pouvait, mais il ne le ferait pas. Parce que s'il le faisait, il devrait se donner la mort après. Et il ignorait comment faire. Personne n'avait jamais réussi à le tuer et il ne pouvait pas demander au premier milicien venu comment on trucidait un vampire. Il reposa calmement son arme, essayant d'être le moins tremblant possible. Elle atterrit sur le bureau et il la fit glisser jusqu'à Allic, après avoir vérifié que la sécurité était bien enclenchée.

"Je n'ai plus rien à faire ic-"

Un bruit sourd de détonation le coupa dans sa phrase. Tony avait trouvé la solution a la barrière psychique. Une balle dans la tête et c'était réglé. Dans une demi-seconde, vingt mafieux seraient dans la pièce à le menacer de leurs gros flingues de mafieux en colère. Grim était l'un d'entre eux mais il serait abattu comme un chien s'ils remarquaient la blessure d'Allic. Il devait s'évader. D'un coup de pied agile, il brisa la fenêtre et grimpa sur le rebord.

"Je te confie Ash, prends en soin. Adieu."

Sur ce, il sauta du troisième étage sans problème apparent et atterrit sur ses pattes, un bout de verre toujours enfoncé dans le pied droit. Après l'avoir sommairement retiré, il prit la tangente rapidement, passant au dessus de la muraille, ignorant si on lui courait après ou pas. Il savait bien qu'on le retrouverait mais il ne se sentait en sécurité que chez lui désormais. A la maison LaPluie. Courant à perdre haleine, il arriva en une petite demi-heure chez lui et s'engouffra dans la vieille maison, claquant la porte derrière lui. Après avoir reprit son souffle, il tenta de calmer son cœur et fila dans la cuisine se préparer un thé. Une demi-heure plus tard, il était dans son fauteuil favori face à la télé éteinte. Voilà, il buvait du thé à l'orange et n'attendait plus rien de la vie.

TSUKI NO KIOKU ♫ d'espairsray

Mourir. Il n'en avait jamais eu peur, mais ne s'y était jamais vraiment préparé. Pour l'instant, sa vie ne défilait pas devant ses yeux en tout cas. Et le canon recula. Allic ignorait ce que fabriquait Grim, mais il garda les yeux fermés, attendant la suite, son cœur cognant comme un fou dans sa poitrine. Et puis, un petit clic. Il souleva les paupières, voyant Sodome être posé doucement sur la table. Puis, l'arme glissa vers lui. Allic ne bougea toujours pas.
Il s'était décidé à lever les yeux en entendant la voix du vampire, mais ce dernier fut interrompu par un son que le mafieux connaissait bien. Au début, il eut une frayeur tout à fait stupide et crut qu'il était mort. Son cœur s'arrêta un instant avant de repartir frénétiquement. Non, ça venait de l'extérieur. Allic posa ses yeux sur la porte. Il ne tolérait pas qu'on tire chez lui sans qu'il sache pourquoi. Tony pénétra dans le bureau, son flingue en avant, prêt à tirer. Au même moment, Grim lui disait au revoir. Allic ne prit pas la peine d'analyser la phrase pour l'instant, il y avait trop à faire.

« TONY ! Explique-moi... ! »

Un bruit de verre brisé, un nouveau coup de feu. Allic tourna la tête vers la fenêtre, qui venait d'être malmenée pour la deuxième fois en deux semaines. La balle de Tony était encastrée dans le cadre. Il avait été trop précipité. Etrange, il ne ratait pas souvent sa cible. Les mafieux se ruèrent à la fenêtre, les canons en avant. Allic leur ordonna à tous de reculer et clopina vers la fenêtre, sa main agrippa Sodome au passage. Il passa la tête dehors et vit Grim, qui se mettait tout juste à fuir. Mais que fabriquait-il cette andouille ? Il était un vampire oui ou non ?
Tony le mettait en joue, mais Allic le dissuada de tirer en collant le canon de Sodome sur sa joue.

« Tu tiens à tes dents Tony ? » menaça-t-il.

Son presque frère ramassa son bras, leva les mains en l'air et recula. Il ne semblait pas fâché. Allic crut même voir l'ombre d'un sourire sur son visage et il baissa le bras en secouant la tête. Tony reprit une position plus calme et remarqua :

« Tu es blessé. »

Oui. Il l'était. Et avait foutu du sang partout.

« Que quelqu'un nettoie tout ça, ordonna Allic avec agacement. Qui a tiré et sur qui ? Et pourquoi ? »

Son attention avait été de marcher d'un pas décidé jusqu'au couloir, mais sa jambe blessée le lâcha et il s'effondra sur le tapis trempé de son propre sang.

Il était au lit depuis deux heures. Sa jambe était bandée, on lui avait fait avaler un steak saignant, des légumes verts, des sardines à l'huile et du chocolat noir. Ca irait mieux demain, d'après le médecin de Famille. Sauf qu'Allic n'avait pas du tout l'intention d'attendre demain. Il avait eut le temps de réfléchir à la phrase de Grim pendant qu'on lui triturait la cuisse. Ash... Il lui confiait Ash. Il avait confiance en lui, parce que Ash était son propre fils. Qu'il avait lui-même adopté. Oui, Allic avait appris ses leçons. Mais c'était n'importe quoi !

Allic se leva et marcha jusqu'à la chambre de Ash. Il frappa, entra, trouva son fils en train de faire ses devoirs. Ou autre chose, peu importait.

«Je vais arranger les choses, donc je vais rentrer tard. Alors ne m'attends pas pour manger. Tu veux que je te prennes quelque chose tant que j'y suis ? Du dentifrice, une paire de chaussettes, une bouteille de soda ? »

Ash leva des yeux ronds dans sa direction et secoua lentement la tête, le crayon en l'air. Allic haussa les épaules et referma la porte derrière lui. Bien, maintenant, passons à Grim.

Allic ignorait totalement où il pourrait trouver Grim. Peut-être même qu'il s'était suicidé, en se hachant menu tout seul. Non, ridicule. Mais alors, où ? Est-ce qu'il avait un autre endroit où aller ? Ah, il aurait du demander à Tony, ou à Ash, avant de partir. Tant pis, il n'allait pas y retourner, pas avec sa sortie théâtrale.
En marchant au hasard des rues, il passa à côté de sa banque et ralentit. Ca lui disait quelque chose. Il s'arrêta bien en face du bâtiment et le fixa. Non. Rien. Il poursuivit sa route, mais ce n'était plus au hasard. Instinctivement, il suivait un parcours dont il ignorait complètement l'aboutissement. Il se retrouva près d'une ruelle, la poubelle qui était là l'interpella. Il grimpa dessus, faisant attention à sa cuisse, et rampa sur le toit. L'homme se remit debout en vacillant, il manquait d'équilibre avec sa foutue blessure. Puis, il admira la vue. Le ciel était plus sombre que dans son souvenir, mais il était certain d'avoir déjà épié le trottoir d'ici.
Comme rien d'autre ne lui venait, il redescendit et continua à marcher. Et après ? Là ! Des images lui revenaient, très vagues. Grim, mais il se l'imaginait comme la dernière fois qu'il l'avait vu. Grim qui lui tirait dans la cuisse. Non, il faisait une confusion avec ce qui s'était passé plus tôt. Allic se souvenait aussi d'avoir était écrasé contre ce mur, il avait eut très mal aux côtes. Et cela le fit sourire. Ce souvenir à priori désagréable faisait naître un chatouillis dans son estomac. Comme ce jour où, adolescent, il avait flashé sur un sportif. Son premier flash. Une déception. Mais le souvenir était agréable.

Les réminiscences s'arrêtèrent malheureusement là et Allic reprit ses déambulations. Il ne cessait de faire tourner en boucle dans sa tête ses nouveaux souvenirs. Son acharnement fini par payer, car il se vit demander à ses hommes de trouver l'adresse d'un certain Grim LaPluie. Il se souvenait de Tony la lui dictant, mais impossible d'avoir l'adresse en question. Cette adresse ! Il devait à nouveau la demander ! Allic allait rebrousser chemin quand sa propre image fonçant dans sa voiture rouge défila dans sa tête. Une voiture qu'il n'avait d'ailleurs pas vue dans son garage. Est-ce que... ?
Allic suivit à pieds le parcours qu'il suivait en voiture dans sa tête. Et il parvint jusqu'à une porte. Dire qu'il avait osé laisser sa décapotable dans ce quartier ! L'homme était heureux, tout content, comme un gosse. Mais il hésita au moment de frapper. Il avait fanfaronné. Pour lui comme pour les autres. Il allait arranger les choses, avait-il assuré. Mais le pouvait-il vraiment ? En avait-il le droit ? Il était Allic Beackerman, il avait tous les droits !

Il toqua à la porte. Et chercha à s'enfuir en marchant rapidement, comme un enfant qui aurait fait une mauvaise farce. Sauf qu'il ne pouvait pas courir.

SHINee~Lucifer (Areia Remix)

Grim était rentré. Chez lui, son seul chez lui à présent. Il avait mit de l'électro' indus' à fond dans la baraque, histoire de chasser ses pensées noires et s'était mit à faire des gâteaux. Chose inutile puisque son régime strict lui interdisait d'en manger. Mais voilà, il ne pouvait s'en empêcher, cuisiner c'était son déstressant. Il en était à quatre tables basses recouvertes de gâteaux quand on sonna à la porte. Un démarcheur? Ash qui avait oublié ses clefs. Grim mit un peu de temps à aller ouvrir, voulant finir son glaçage avant. Quand il ouvrit enfin la porte, il remarqua un vide. Quoi, des gamins avaient sonné pour rien? Les démarcheurs étaient partis? Et puis une forme, au loin. Ash? Non. S'avançant rapidement vers l'homme, il l'intercepta et l'envoya contre le mur. Il ne lui avait rien cassé cette fois.

"Tu sonnes et tu t'enfuis? C'est quoi ton problème?"

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Il l'avait ramené à l'intérieur, en silence. Un café de son coté, un du sien, noir sans sucre, comme il aimait. L'un assit dans son fauteuil, l'autre sur une chaise. Il s'était senti obligé de le ligoter, au cas où il veuille reprendre la fuite.

"Pourquoi tu es revenu? J'avais été clair pourtant, je t'ai quitté. Tu m'as fait trop de mal mais jamais, jamais je n'oserais te tuer, même dans un accès de rage, je t'aime trop. Je voulais juste ne plus entendre parler de toi, ne plus te voir, t'entendre. Alors quoi? Tu m'aimes? Tu te souviens? Tu ne crois pas qu'il est trop tard? Tu as tué notre enfant, mon espoir. Tu as abattu notre couple d'une balle dans la tête."

Un soupir. Qu'attendait-il? Il devrait sans doute lui enlever son bâillon. Retirant la cravate orange qui avait servi à museler son fiancé, il se mordit la lèvre.

"Dire que ma sortie théâtrale était géniale."

Il allait y arriver ! HAHAAA ! Oui, bientôt, bientôt, il allait disparaitre dans l'autre rue et... Une bousculade. Allic n'eut pas le temps de repousser son agresseur qu'il se retrouva collé à un mur. Pourtant, il n'avait ressenti aucune douleur. Peut être avait il quelques problèmes nerveux...

Il était assis sur une chaise, avec un bon café devant lui, dans une maison qui embaumait le gâteau. Ca aurait du le combler. Sauf qu'il était ligoté et bâillonné. Guère pratique pour profiter du café, n'est ce pas ? En plus, Grim n'arrêtait pas de parler. Il semblait étonné de le voir ici. C'était fort dommage, parce qu'Allic aussi était finalement très étonné de se trouver ici. Il avait décrété qu'il allait résoudre tous les problèmes. Que tout reviendrait à la normale. Ouais. Sauf qu'il n'avait même pas préparé de spitch. Il était juste là, une expression très calme sur le visage, à regarder Grim parler et humer les odeurs de la maison. Et puis, finalement, Grim trouva opportun de libérer sa bouche. Plus évident quand on voulait avoir des réponses.

"Afh... Je suis venu parce que je voulais que tu reviennes. C'est tout. Je ne me souviens de rien. Mais je regrette. Et...Peut être que je suis attaché à toi. Je peux avoir du café ?"

Allic savait bien que ça ne suffirait probablement pas. Mais il devait essayer. Sans mentir. Sans mener Grim en bateau avec ce qu'il voulait entendre.

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