Khahth gambadait joyeusement dans les allées du centre commercial de Modernis. Il aimait bien faire les magasins. Pas forcément acheter, non. Rien que regarder les vitrines, il trouvait ça rigolo. Il y avait une vitrine qu'il aimait bien en particulier, parce qu'il y avait un joli bonnet avec des oreilles de nounours dedans, qu'il aurait bien aimé s'acheter, mais il n'avait pas assez de sous pour l'instant. L'autre vitrine qu'il aimait bien, c'était celle où il allait acheté ses chaussures, parce qu'il y avait toutes les couleurs possibles d'exposés dans la vitrine, et qu'un jour, il ferait pareil dans sa chambre, dès qu'il aurait toutes les couleurs !

Il s'arrêta devant un magasin pour s'extasier devant l'écharpe toute coloré exposé dans la vitrine, plaquant ses mains contre le verre, et lâchant un « ooooooooh » émerveillé. Il regarda fixement l'écharpe pendant plusieurs minutes, se mordillant les lèvres pour résister à l'envie. Et puis il se détourna. Il la demanderait pour son anniversaire, avec le bonnet !

Il reprit sa route, sa besace couverte de divers morceaux de tissus colorés plaqués contre son ventre. Il était tard. Il commençait à avoir faim. Et il y avait un marchand de glace, juste là. Il adorait la glace. La glace, c'était son repas préféré, avec les gâteaux. Il pouvait en manger à longueur de journée, même si sa maman n'était pas d'accord.

Bonjouuuuur ! lança-t-il gaiement au marchand de glace.
Je voudrais une glace à la vanille s'il-vous-plait monsieur !

Il se balança d'avant en arrière, regardant autour de lui pendant qu'on le servait. Et puis il se souvint qu'il devait payer, alors il farfouilla dans son sac, sortant sa peluche en forme de lapin pour trouver son porte-feuille. Il réussit enfin à le dénicher et échangea un peu d'argent contre sa glace.

Merci, au revoir monsieur !

Il remit délicatement Ti'lapin (c'était le nom qu'il donnait à sa peluche depuis qu'il était tout petit) dans son sac, prenant soin de laisser sa tête dépasser pour qu'il puisse respirer (oui, les peluches respirent, c'est un fait bien connu), et puis il commença à manger sa glace. Elle était drôlement froide -ce qui était logique, quand on y pensait- et ça le fit frissonner. En à peine quelques coups de langue, il avait de la glace à la vanille tout autour de la bouche. Mais il s'en fichait éperdument d'être tout sale et tout collant !

Il s'arrêta devant la fameuse vitrine où trônait le bonnet à oreille de nounours. C'était l'un de ses petits rituels, il s'arrêtait devait, il le regardait quelques minutes, et puis il repartait. Un jour, il l'aurait, et il serait mignon tout plein avec ! Il lécha une autre lampée de glace à la vanille, puis se retourna gaiement, pour repartir de son pas sautillant.

Là, il heurta quelque chose de dur qui le fit reculer de plusieurs pas. Il releva la tête, et constata, horrifié, que sa boule de glace avait atterri sur les vêtements de quelqu'un. Il eut le réflexe de se protéger aussitôt la tête de ses bras, les restes de glace que contenaient son cornet goutant sur sa chevelure blonde.

Pardon, j'suis désolé, j'ai pas fait exprès, pardon pardon pardon me tapez pas s'il-vous-plait pardon ! s'excusa-t-il à toute vitesse.

Il ferma les yeux, en attente de coup hypothétique. Il n'aimait pas se faire taper, ça faisait mal. Alors il préférait attendre dans le noir que ça vienne.

Khahth était toujours recroquevillé sur lui-même. Il se fichait de la glace qui goûtait sur le haut de son crâne, et de ses cheveux qui allaient très certainement être tout collant, tout pareil que ses doigts. Il attendait juste de se faire taper. Il espérerait que ça ne durerait pas trop longtemps. En attendant, attendre de se faire taper, ça faisait peur.

Il sursauta lorsqu'une main se posa sur son épaule, et il sentit même les larmes lui monter aux yeux. Mais la main resta juste sur son épaule, sans le frapper. Et une voix rajouta même quelque chose.

Bonjour ! Ne t'inquiètes de rien, nous n'allons pas te frapper. Je m'appelle Aloïs, et lui c'est Timothée ! Dis-moi, où as tu trouvé cette chose froide et délicieuse ?

Khahth rouvrit prudemment les yeux, protégeant toujours sa tête de ses bras. Il avait déjà dû se faire trop taper dessus, alors il s'imaginait des choses. Mais le monsieur qu'il avait bousculé laissait juste sa main sur son épaule, attendant probablement qu'il réponde.

C'est... c'est vrai, vous allez pas me taper ?

Il décroisa lentement les bras, mais resta recroquevillé sur lui-même, au cas où le monsieur changerait d'avis. Il était écarlate, et il sentait la glace couler dans ses cheveux, mais il essaya de rester aussi digne et droit que possible.

Euh euh euh... je... j'ai acheté ça là-bas ! indiqua-t-il précipitamment en montrant du doigt le stand du glacier. J'ai pas fait exprès, j'suis désolé, pardon pardon pardon ! s'excusa-t-il ensuite avec force moulinet du bras, faisant gicler des restes de glace fondu un peu partout autour de lui.

"MOUUUUUUUUUUUAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhh" fut le premier gazouillement du petit Ken. Se levant difficilement dans son pyjama à icône de nounours, ken traîna des pieds jusqu'à la cuisine où il se servit un grand chocolat chaud dans lequel il trempa une tartine beurrée et du camember.

Devant la glace de la salle de bain il se frottait encore les yeux de fatigue et baillait de toutes ses belles dents blanches.

Il enfila des habits dit du Dimanche et une veste à capuche de lapin puis sorti se promener. Sa première visite fut celle du parc avec ses petits oiseaux et sa tendre pelouse verte. Il était si fatigué qu'il s'allongea sur l'herbe et s'y endormit.

Plus tard dans la journée, il se réveilla, assez dérouté mais mieux ! Un problème de taille était cependant présent : le soleil de pleine journée !! Il rentra donc chez lui à toute allure pour se protéger des rayons lumineux incandescents (pour lui du moins). Là, monsieur était essoufflé et repiqua un petit somme.

Vers la fin d'après midi, il se reréveilla et sorti pour passer une soirée agréable. Il s'arrêta d'abord au marchant de bonbon et pris un assortiment de tous *w*. Puis, comme le froid tombait, il s'arrêta devant un magasin où ils vendaient un écharpe absolument mignonne ! Sur de ses économies, il put se l'offrir et n'eut plus froid.

Avançant tranquillement et à pas détendu, Kentamru s'arrêta en extase devant un autre marchant qui vendait des glaces. Il avait encore quelques bonbons en rade donc reviendrait dans peu de temps. Mais sur son parcourt d'aventurier urbain soumis aux tentations, il s'arrêta en extase devant un magasin de jouet. Des bonnets, les gants en pattes de chats, des déguisements de lapins...etc
Kentamaru restait figé devant cette vitrine, mangeant ses bonbons et se cachant derrière la superbe écharpe.

Une voie d'homme le fit sursauter et revenir à lui.

"Veuillez m'excuser, puis je vous parler un instant ?"

Kentamaru vit alors un homme à l'apparence jeune et sympathique, il en conclue donc avec sa grande naïveté que cette personne était inoffensive.
Il lui sourit poliment tout en baissant un peu son écharpe et dit de ses petits yeux pétillants de simplicité :

"Oui bien sur ! Vous voulez une petite friandise ?"

il lui tendit alors son paquet de bonbons quasi vide.

Son regard quitta son interlocuteur pour s'attarder sur son "suiveur' à l'apparence tout de même moins plaisante. il remarqua dans ses mains deux glaces : l'unes de celles qu'il désirait !! Il les fixa alors. Le froid tombait et ses lentilles noires commençaient hélas à lui faire un mal de fou. Néanmoins, la douleur physique le connaissait alors il essaya tant bien que mal de l'ignorer... Sans compter qu'un humain ne pouvait pas le voir avec ses yeux jaunes !!! surtout pas deux en plus ! Vous imaginez l’embarras !!!!??

Enfin bref, le petit ken attendait impatiemment la question du jeune homme.

Le monsieur lui avait dit d'attendre. Alors il attendait, en se dandinant sur place, un peu mal à l'aise. Khahth avait toujours été un garçon très obéissant. Naïf aussi, mais c'était une autre histoire. En tout cas, il espérait ne pas devoir attendre trop longtemps. Il était quand même tard, sa maman allait s'inquiéter, et il n'aimait pas quand sa maman plissait le front d'inquiétude. En même temps... il n'osait pas partir en douce, le monsieur en aurait peut-être été vexé. Peut-être même que cette fois, il l'aurait tapé.

Il commença à se balancer d'avant en arrière sur ses pieds, marmonnant des notes sans suite. Et puis le monsieur s'arrêta pour discuter avec un autre. Qu'était-il sensé faire maintenant ? Il attendait quand même ou pas ? S'il se faisait taper, il allait regretter de ne pas s'être enfui. En même temps... la plupart du temps, il n'avait pas suffisamment de bon sens pour décider du moment où il devait s'enfuir.

Il se sentit brusquement déséquilibré en avant lorsque quelqu'un le bouscula violemment. Il réussit néanmoins à se rattraper de justesse en battant des bras. Ce faisant, le reste de cornet de glace lui échappa des doigts et alla s'éclater sur le pavé.

Eh ! tu peux pas faire attention nan !

Oh, pardon monsieur ! s'excusa-t-il aussitôt, sans penser à une seule seconde à protester puisqu'il n'était pas en tort. Je vous avais pas vu, j'ai pas fait exprès, pardon !

Il ne faisait jamais exprès, c'était un fait. Il était toujours distrait par quelque chose qui faisait qu'il ne s'intéressait pas spécialement attention à ce qui se passait autour de lui. Cela expliquait la quantité phénoménal de personnes qu'il pouvait percuter en une seule semaine.

Eh mais... c'est quoi ça ?

Il suivit des yeux le geste du jeune homme qui lui faisait face, et il protesta aussitôt lorsqu'il comprit ce qu'il voulait faire, et encore plus lorsqu'il attrapa son Ti'lapin par la tête pour l'extraire de son sac.

Non, rendez-le moi ! C'est le mien!

Eh les mecs, regardez le bébé avec son doudou !

Rends-le moi !

Le jeune homme éclata de rire avec ses amis, et agita Ti'lapin au-dessus de sa tête. Mais Khahth avait beau sautiller, il était beaucoup plus petit que son assaillant. Et puis Ti'lapin décolla dans les airs, et l'un des compagnons de son agresseur initial le rattrapa au vol. La peluche passa de main en main, sans qu'il ne parvienne à la récupérer, au milieu des rires gras. Il tenta le tout pour le tout et se rapprocha du détenteur du moment pou essayer de récupérer son bien.

Fais gaffe à ce que tu fais toi !

On le poussa brusquement en arrière et il atterrit lourdement sur les fesses. Il n'eut pas le temps de se relever qu'une semelle de chaussures lui écrasa les doigts de la main gauche, le faisant pousser un petit cri aigu.

Ça t'apprendra à me manquer de respect!

Khahth essayait désespérément de libérer ses doigts en tirant sur sa main de toutes ses forces. Mais tout ce qu'il réussit à faire, ce fut d'accentuer un peu plus la douleur qui lui vrillait la main jusqu'au coude. Des petites larmes lui perlaient des yeux.

Et puis d'un coup, le pied décolla vivement de sa main, et Ti'lapin atterrit au sol. Quelques secondes plus tard, son agresseur retomba durement sur le sol de la galerie, loin, très loin de lui, sans qu'il ne comprenne trop par quel miracle.

Il comprit lorsqu'un cri de douleur lui fit lever la tête. Le monsieur qui accompagnait le petit monsieur qu'il avait agressé à la glace était en train de tordre le poigne du méchant monsieur pour lui faire peur. Cela eut l'air de fonctionner puisqu'ils détalèrent tous sans demander leur reste.

Mais Khahth s'en fichait et se précipita pour récupérer Ti'Lapin de sa main valide et le serrer contre lui. Il n'eut même pas le courage de se lever, sentant que ses jambes n'allaient pas tenir lorsqu'il serait debout, et il préféra serrer sa main blessée contre lui, les yeux humides de larmes. Il ne gémit pas cependant. Il se faisait tellement souvent taper dessus qu'il avait fini par avoir une grande capacité de résistance à la douleur.

Il osa à peine regarder ses doigts qui commençaient à avoir une couleur bleuâtre violacée assez peu ragoûtante et préféra lever le nez vers son sauveur.

Merci monsieur marmonna-t-il tout bas.

Il renifla. Il avait de plus en plus mal, mais il ne voulait pas le montrer. On allait encore le traiter de bébé, et il n'aimait pas ça. N'empêche... il aurait bien aimé que sa maman soit là pour le soigner et le consoler...